Introduction
La conservation par voie chimique des aliments (utilisation des substances chimiques) a commencé quand l’homme a appris à protéger chaque récolte jusqu’à la récolte suivante, et à conserver viande et poisson en les salant ou en les fumant. Les Egyptiens, par exemple, ont utilisé des colorants et des arômes pour augmenter l’attrait de certains produits alimentaires et les Romains ont eu recours au salpêtre (ou nitrate de potassium), aux épices et colorants pour la conservation et l’amélioration de l’apparence des aliments.
Ces 50 dernières années, les développements scientifiques dans l’alimentation et les avancées technologiques ont abouti à la découverte de nouveaux additifs alimentaires utiles pour la conservation par voie chimique des aliments contre les dégradations et les altérations dues aux réactions chimiques (oxydation non enzymatique, dégradation des vitamines et des acides aminés, etc.), biologiques (oxydation enzymatique et autres dégradations par voie enzymatique) et microbiologiques.
Les additifs qui remplissent cette fonction de conservation par voie chimique des aliments sont classés en deux catégories principales : Les conservateurs et les antioxydants.
Conservation par voie chimique des aliments par l’ajout de conservateurs
Les conservateurs sont des substances qui limitent, ralentissent ou stoppent la croissance des microorganismes (bactéries, levures, moisissures) présents ou entrant dans l’aliment et préviennent donc l’altération des produits ou les intoxications alimentaires. Ils sont employés entre autres dans les aliments cuits, le vin, le fromage, les jus de fruits et les margarines.
Le nombre E des conservateurs autorisés actuellement au niveau de l’union européenne va de E200 à E297. Le tableau suivant donne quelques exemples des conservateurs les plus couramment utilisés.
Nombre E | Substance/Classe | Exemples de denrées alimentaires dans lesquels ils sont utilisés |
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E 200 – 203 | Acide sorbique et sorbates | Fromages, vins, fruits séchés, purées de fruits, garnitures |
E 210 – 213 | Acide benzoïque et benzoates | Légumes au vinaigre, confitures et gelées à faible teneur en glucides, fruits confits, semi-conserves de produits de la pêche, sauces |
E 220 – 228 | Dioxyde de soufre et sulfites | Inhibent la croissance bactérienne dans les fruits secs, fruits en conserve et vins. Ils ont aussi des propriétés antioxydantes. |
E 235 | Natamycine | Traitement de surface des fromages et des saucissons |
E 249 – 252 | Nitrites et nitrates | Employés dans les préparations à base de viandes (jambon, saucissons, foie gras, etc.) pour empêcher la croissance du Clostridium botulinum. |
E 282 | Propionate de calcium | Prévient le développement des moisissures sur le pain et les aliments cuits. |
Conservation par voie chimique des aliments par l’ajout d’antioxydants
Les antioxydants sont des molécules qui aident à protéger les aliments contre les réactions d’oxydation qui accélèrent le vieillissement. Il peut s’agir d’altérations dues à l’oxygène de l’air, à la lumière, aux traces de métaux ou à certaines enzymes. Les antioxydants regroupent la catégorie des antioxygènes et celle des séquestrants.
L’acide ascorbique (ou vitamine C), contenu dans de nombreux agrumes, est fréquemment utilisé dans les cuisines et dans la production alimentaire pour empêcher l’oxydation des aliments (changement de couleur des fruits et légumes fraîchement épluchés ou découpés). La vitamine C et ses divers sels sont aussi ajoutés pour protéger les boissons non alcoolisées, les confitures, le lait concentré et les saucissons.
Les tocophérols, qui font partie de la famille de la vitamine E, sont un autre exemple d’antioxydants naturels. On les trouve principalement dans les noix, les graines de tournesol, les pousses de soja et de maïs et ils sont le plus souvent utilisés pour conserver les huiles végétales, la margarine et les produits à base de cacao.
L’acide ascorbique et les tocophérols étant des antioxydants très employés et les besoins ne pouvant être couverts entièrement à partir de sources naturelles, ces deux composés sont aussi produits par synthèse depuis quelque temps. Il est maintenant possible de copier leur structure moléculaire de façon si parfaite qu’il n’existe plus aucune différence ni dans leur structure ni dans leurs effets. En d’autres termes, ces substances « identiques aux naturelles » sont globalement identiques à leurs originaux.
Les antioxydants artificiels sont tout aussi utilisés que les antioxydants « naturels » et ceux « identiques aux naturels ». Les principaux appartiennent au groupe des gallates (E 310-312). Les gallates sont ajoutés principalement aux huiles végétales et à la margarine pour les empêcher de rancir et pour préserver leur goût.
Le tableau ci-après donne quelques exemples d’antioxydants les plus couramment utilisés.
Nombre E | Substance/Classe | Exemples de denrées alimentaires dans lesquels ils sont utilisés |
---|---|---|
E 300-302 | Acide ascorbique, Ascorbate de sodium, Ascorbate de calcium | Boissons non alcoolisées, confitures, lait concentré, saucisson, maintiennent la couleur des fruits et légumes fraîchement épluchés ou découpés |
E 304 | Palmitate d’ascorbyle | Saucissons, bouillon de poule |
E 306-309 | Tocophérols | Huiles et graisses végétales |
E 310-311 | Gallates, Octyl gallate | Graisses et huiles destinées à la production professionnelle, huiles et graisses de friture, assaisonnements, soupes déshydratées, chewinggum |
E 320-321 | BHA (Butyl hydroxyanisole), BHT (Butyl hydroxytoluène | Bonbons, raisins secs, fromage fondu, beurre de cacahuètes, soupes instantanées |
Autres agents de conservation des aliments par voie chimique
De nombreuses autres applications, en cours de développement, reposent sur l’utilisation de substances présentes naturellement (elles sont donc plus facilement acceptées par le consommateur) dans les organismes animaux et végétaux, voire dans les microorganismes, et présentant des propriétés antimicrobiennes ou antioxydantes.
Le lysozyme, par exemple, présent dans des liquides corporels et jusqu’à une teneur de 3,5% dans la matière sèche du blanc d’œuf fait déjà l’objet d’applications commerciales : il est considéré comme additif (E 1105) puisqu’il est ajouté lors de la transformation des denrées alimentaires. Il lyse les formes végétatives de nombreuses bactéries gram+ mais il est inactif contre les bactéries gram- (leur membrane externe empêche le lysozyme d’accéder aux peptidoglycans sous-jacents qui sont le substrat de cet enzyme). Parmi les substances présentant des propriétés antimicrobiennes ou antioxydantes exploitables, on citera encore quelques exemples :
- d’origine animale : la lactoperoxydase (présente dans le lait, le colostrum, la salive, …); l’ovotransferrine (dans l’oeuf), la lactoferrine (dans le lait) ;
- d’origine végétale : composés phénoliques présents dans de nombreux épices, acides organiques présents dans de nombreux végétaux.
Législation relative à l’utilisation des conservateurs et des antioxydants
Comme tous les additifs alimentaires, les conservateurs et les antioxydants sont soumis à une réglementation stricte et ce malgré leurs effets bénéfiques sur l’organisme (cas des vitamines C et E) et sur la conservabilité des aliments.
La législation, d’une manière générale, exige que l’utilisation des additifs soit autorisée pour l’aliment considéré et ce sans dépasser les limites maximales fixées. En plus, ils doivent être mentionnés sur l’emballage du produit par catégories (antioxydants, conservateurs, colorants, etc.), par leur nom ou par leur code. (Pour en savoir plus)